« PROJETS ATLAS »
13 mai au 30 juin | May 13 to June 30
vernissage 13 mai 15h00 | May 13 ~ 3:00PM
galeriereneblouin.com
Comme la lumière des galaxies a pris des millions d’années à nous parvenir, la poésie semble aussi provenir d’un autre temps, d’un passé qui précède le langage et l’écriture. Ce projet consiste à réinventer les mythes et constellations sur une nouvelle carte céleste, et ce à partir de poèmes retranscrits à la main les yeux fermés. J’ai commencé à travailler à l’aveugle et à mémoriser les écrits suite à un trouble de vision qui s’est développé durant la retranscription des textes fondateurs (2007-2015). Sur cette cartographie fictive de l’univers, les points représenteront toutes les galaxies répertoriées jusqu’à ce jour. Plus d’un million de points seront comptés et dessinés. Une première constellation reliera certaines de ces galaxies, associées à des poèmes de diverses époques, comme autant de dialogues subtils et de rencontres impossibles entre des auteurs à travers le temps et l’espace.
LA CARTE
Cette carte provient de ma fascination pour les nombres astronomiques. Il est bien difficile de saisir l’ampleur de ce que signifie un million, il s’agit d’une notion purement mathématique. En utilisant un compteur de pointage, je compterai jusqu’à cent plus de dix mille fois. Mon intention est de faire l’expérience de ce que représente ce nombre. Le fait que les points seront dessinés à la main, qu’ils auront passée par le vivant, donne tout son sens à cette expérience. Le regardeur peut réellement saisir cette immensité lorsque la main l’a tracée, lorsque le corps a fait le trajet.
CONSTELLATIONS
J’ai mémorisé les poèmes en les copiant dans un cahier de notes sans jamais répéter à voix haute. Tout a passé par la réécriture. Le nombre de relectures nécessaires à l’apprentissage de chacun de ces poèmes a déterminé la quantité de fois qu’ils ont été retranscrits. Les surfaces de mots comprimés de ces retranscriptions représentent ainsi un espace de mémorisation.
Un peu à la manière de Jorge Luis Borges dans La Bibliothèque de Babel, tous les poèmes jamais écrits et tous ceux à venir pourront prendre place dans Atlas. La première constellation sera formée de huit poèmes ou extraits sélectionnés arbitrairement et retranscrits dans cet ordre: La courbe de tes yeux de Paul Éluard, un extrait de The Tempest de Shakespeare, Ophélie de Rimbaud, Words de Sylvia Plath, un extrait de Sans bout du monde de Hélène Dorion, Echo de Christina Rossetti, Mon tendre de Geneviève Desrosiers et Pear tree de Hilda Doolittle.
Les écrits de cet ensemble sont comme les mots d’une même phrase. Un métapoème est créé par leur agencement aléatoire et un récit prend forme, qui est plus que la somme de ses parties. À chaque poème, une étape de cette histoire semble se franchir, comme les chapitres importants d’une vie. Dans les quatre premiers poèmes se jouent d’abord l’idéalisation, la désillusion et l’éventuelle chute dans l’abîme avec Words. Ensuite vient l’apogée, les mots de Hélène Dorion rencontrent ceux de Sylvia Plath, comme si elle lui tendait la main afin de la sortir des profondeurs. Sans bout du monde est une renaissance.
Avec les trois derniers poèmes vient la nostalgie pour ce lien délicat entre ces deux êtres, né de cette rencontre salvatrice. Malgré les millions d’années-lumière qui sembleront les séparer sur la carte céleste du projet Atlas, un dialogue subtil opèrera grâce à la constellation. Ces écrivains qui ne se sont jamais rencontrés, d’époques et de lieux différents, parleront ici d’une seule voix comme si le temps et l’espace étaient abolis.
simonbertrand.net
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