« L’EXIL ET À LA LIBERTÉ D’EXPRESSION »
10 mars au 5 avril | March 10 to April 5
vernissage 10 mars 18h00 | March 10 ~ 6:00PM
ebama.ca/galerie-artus
Dans le contexte d‘une lutte acharnée contre la discrimination des artistes professionnels du Québec, Nikolai Kupriakov produit en 2013 une œuvre contestataire où figure le portrait de la juge Claudine Roy en excréments. Il est immédiatement réprimé par la police du Québec. Ainsi, sa lutte contre la discrimination se transforme en lutte pour la Liberté d‘expression. Nikolai Kupriakov se voit obligé de s’exiler, et sa femme, Stéphanie Brosseau, aussi artiste-peintre, le suit. Lors de leur séjour dans différents pays, ils créent des œuvres et des performances dans lesquelles le principal sujet s’articule autour de leur exil, la liberté d’expression et les droits fondamentaux. De retour au Québec, ils présentent cette exposition de tableaux qui se veut la synthèse de leur exil.
Deux humains qui partagent un exil, créent des œuvres en exil et sur l’exil. Deux perceptions différentes réunies par leur amour, par une vie commune et par la soif de création. Des œuvres créées avant, pendant et après l’exil.
NIKOLAI KUPRIAKOV
S’exiler, pour défendre sa cause. Renoncer à son confort, à son bien-être, ce n’est que le prix à payer. Que devons-nous choisir entre la liberté et le confort personnel? Ce confort bâti pendant des années qui est le résultat de la réalisation des projets d’une vie. Que devons-nous choisir entre la liberté et la stabilité? La stabilité qui est peut-être une illusion, mais une illusion extrêmement attirante, qui comprend le travail, la maison, la famille, la position sociale… Que doit faire un artiste lorsqu’il est acculé au pied du mur? Que doit-il faire quand le moment arrive et qu’il doit choisir entre l’art et le confort, entre ses principes et la stabilité? La capacité de renoncer au confort et à la stabilité pour défendre ses principes, c’est un privilège. Suite à cette libération, la création d’un artiste devient tellement facile. L’autocensure n’existe plus. C’est lorsque ses principes dirigent la création, que l’artiste devient véritablement lui-même. Il embrasse son destin sans crainte ni censure. Ainsi, s’exiler devient l’ultime affirmation du moi de l’artiste. S’exiler, c’est se libérer de ce que les autorités tentent de nous imposer. Puisqu’accepter ce qu’ils nous imposent, c’est anéantir notre être par la répression de ce qui fait notre identité. Ainsi, l’exil est une forme de libération.
STÉPHANIE BROSSEAU
L’exil, c’est le point de non-retour, partir sans savoir si l’on reviendra un jour, et sachant que même si on revient, plus rien ne sera jamais pareil. Nous aurons changé. Positivement : en tant qu’artistes, nous aurons grandi, évolué, transgressé les limites imposées sur notre art par la société, par les autorités. Mais qu’adviendra-t-il de nous en tant que personnes? Parce que s’exiler, c’est accepter de renoncer à une partie de soi. On pourra peut-être revenir à la maison, mais on ne pourra jamais revenir en arrière. Une fois qu’on s’est exilé, une part du moi vivra toujours en exil. Elle errera éternellement dans le néant émotif de la terre d’exil. Je n’ose pas dire terre d’accueil, parce qu’elle ne nous a pas nécessairement accueillis, ou peut-être contre son gré, parce que l’on s’est imposé. Ne l’oublions jamais : nous nous sommes peut-être sentis rejetés par notre propre patrie, mais la terre sur laquelle nous avons débarqué ne nous a jamais invités. En exil, nous mangerons toujours à la table des autres. Nous vivrons désormais chez les autres, avec leurs règles, leurs contraintes : est-ce vraiment cela la liberté? Et puis, cette nouvelle société a-t-elle vraiment quelque chose de mieux à offrir que celle que nous avons quittée? Trouvera-t-on vraiment la chose manquante? La liberté brimée. Serons-nous plus libres ailleurs? Peut-être que oui; probablement pas. Mais certainement ici nous serons isolés, incompris, loin de ceux qui nous sont chers, qui eux sont restés derrière, abandonnés, le regard triste, impuissants devant ce départ, déchirés entre la douleur de la séparation et le désir de comprendre, voire même l’effort de partager ce principe, cet idéal si grand qu’il leur a volé un enfant, un père, une sœur.
Sur le plan du contenu des œuvres, deux fils conducteurs sont privilégiés :
La première approche consiste à interpréter un défilé d’événements personnels et d’événements tirés de l’actualité socio-politique, en les reliant par une vision basée sur l’intransigeance quand il s’agit de la défense des droits. Ainsi, les sujets abordés s’articulent essentiellement autour de la liberté d’expression et d’autres droits fondamentaux.
La deuxième consiste en une métaphore de l’exil et fait référence à un conte de fées. Un rapprochement est fait entre le thème de l’exil et les récits de Lewis Carroll, Les Aventures d’Alice au Pays de Merveilles (1866) et De l’autre côté du miroir (1872). Ainsi, les tableaux illustrent les principales étapes de l’exil de façon métaphorique, en faisant un parallèle entre l’exil vécu par les deux artistes et le célèbre voyage d’Alice au Pays des Merveilles.
- Nikolai Kupriakov & Stéphanie Brosseau
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