« SOUVENIRS FROM THE JASMINE CAFÉ »
jusqu'au 17 juin | until June 17
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Karen Tam, Souvenirs from the Jasmine Café, 2017. Photo : Karen Tam
Dans Souvenirs du Jasmine Café, je revisite mon intérêt de longue date pour les restaurants chinois. J’y propose une installation d’objets et de documents provenant de ma collection d’objets-souvenirs de restaurants chinois datant des années 1920 aux années 2000, combinés avec des « artefacts » et des souvenirs plus récents que j’ai créés. Le restaurant chinois nord-américain est un terrain fertile pour réfléchir aux enjeux relatifs à la race, à la politique de l’exposition et à la représentation. C’est une archive et une collection vivantes de nourriture, de concepts, d’images, et d’objets produits et consommés par ceux et celles qui y travaillent et/ou qui y mangent. L’évolution de ces établissements peut être tracée au moyen d’objets éphémères connexes qui s’adaptent aux goûts changeants au fil des décennies.
In Souvenirs from the Jasmine Café, I revisit my long-time interest in the Chinese restaurant and propose an installation display of objects and documents from my collection of Chinese restaurant memorabilia that date from the 1920s to the 2000s along with newer restaurant ‘artifacts’ and souvenirs I have created. The North American Chinese restaurant is a fertile ground for the investigation of issues concerning race, the politics of display and representation. It is a living archive and collection of food, conceptions, images, and objects produced and consumed by those who work and/or eat there. The evolution of these establishments can be charted through their associated ephemera as they have adapted to suit shifting tastes over the decades.
…Livres de recettes, livrets, assiettes, verres, tasses, théières, baguettes, cendriers, bâtonnets à cocktail, bols. Menus de salle à manger. Menus pour emporter. Menus souvenirs. Photos souvenirs. Négatifs 4×5”. Pochettes d’allumettes, cartes postales, éventails souvenirs, chromos publicitaires, cartes d’affaires, cartes de souhaits, boîtes, sacs, serviettes, petits billets que l’on retrouve dans les biscuits chinois. Disques vinyle, partitions. Jeux Chop Suey rétro, enseignes en néon. Chaises en vinyle rouge, caisses enregistreuses, uniformes en polyester, chandails et baguettes, lanternes. Cafetière, hachoir. Coupures de presse, affiches, coupons, billets de tombola…
Trouvés dans des maisons, des sous-sols, des fonds d’armoires, des greniers, même dans des boîtes poussiéreuses empilées dans des garages, le matériel d’archive provenant de restaurants chinois constitue les traces de vies passées à l’arrière dans la cuisine, à l’avant dans les salles à manger, des nuits à « s’encanailler » dans Chinatown tout en avalant rouleaux impériaux et chop suey, d’occasions festives ou spéciales, de conflits insignifiants, d’avis légaux, de cambriolages, de braquages, et même de meurtres. Ma collection d’objets-souvenirs de restaurants chinois a pris forme à peu près à la même époque où j’ai créé mes premières œuvres prenant pour sujet le restaurant chinois, provoquées par la décision prise par mes parents de vendre leur restaurant. Tentant de trouver une façon de conserver un endroit et un environnement dans lequel j’avais grandi, j’ai commencé à documenter notre restaurant au moyen de photos, de vidéos, de dessins, etc. J’ai produit des œuvres d’art basées sur les restaurants chinois, et partout où j’ai présenté ces œuvres, je suis entrée en contact avec la communauté chinoise locale et j’ai recueilli les histoires, mémoires, photos de famille et souvenirs de leurs années de restauration. Au fil des années, j’ai agrandi ma collection en demandant à des restaurants, à des retraités, à mes amis et à ma famille de me faire parvenir tout menu inutilisé ou objet-souvenirs de restaurants, en achetant des pochettes d’allumettes, des cartes postales, des photos de fils de presse et des livres de recettes sur eBay. De façon modeste, je voulais contribuer et capturer l’histoire et les expériences des communautés de restaurateurs que j’ai croisées.
Peut-être qu’en collectionnant et en créant une archive de ce matériel, qui n’est pas encore considéré comme étant assez important pour être inclus dans une version officielle de l’histoire, celui-ci peut être vu comme une contre-archive et un acte de résistance envers ce qui a été effacé, omis et interprété dans les histoires publiques. En tant que souvenirs d’endroits « exotiques » et de la façon dont ces endroits sont vécus, ces objets provenant de restaurants prennent la place des corps et communautés racialisés et absents, racés par leur emplacement et leur rôle. Dans les vitrines des restaurants chinois, le regard sur ce qui est exposé est simultanément tourné vers l’intérieur et vers l’extérieur. En re-présentant ces objets éphémères dans le cube SIGHTINGS — un site qui n’est pas si différent des vitrines d’exposition et des expositions d’art dans les aéroports internationaux où des individus transitent entre deux lieux —, une nouvelle vie leur est donnée, permettant de construire de nouvelles significations et de nouvelles histoires. Qu’elles soient publiques ou personnelles, les collections et les archives de ces souvenirs peuvent s’avérer des aides efficaces pour comprendre les espaces historiques des restaurants chinois.
En choisissant d’examiner des lieux de commerce où l’exotique a été apprivoisé et sert à satisfaire les désirs et les besoins du visiteur-touriste, je pose un geste orienté vers la reconceptualisation du discours dominant (ou son absence) sur ces endroits chinois hybrides, et la correction de la sous-représentation du Canada asiatique dans la recherche historique et les archives. Comment une collection comme celle-ci peut-elle être mise en relation avec l’environnement autour de l’Université Concordia, qui a une forte présence asiatique ? Quelles transformations les menus et autres objets imprimés ont-ils subies afin de répondre aux attentes de leur époque ? Que peut-on glaner à partir de matériel comme des menus et des cartes postales à propos de restaurants et de boîtes de nuit ? Que peut-on lire dans le texte, le langage et l’imagerie utilisés ? Comment l’acte de collectionner des souvenirs, photographies et documents éphémères de restaurant élargit-il la notion d’« archives de chinoiseté » (« archives of Chineseness ») avancée par Lily Cho ? Comment cet acte opère-t-il en tant que vestige et témoignage de la culture de restauration chinoise d’outre-mer, et comment contribue-t-il à construire une identité diasporique ? Si la plupart des établissements plus grands et plus affluents sont en mesure de se promouvoir au moyen de publicités dans des journaux ou à la télévision, de cartes postales, de pochettes d’allumettes, etc. – qui sont tous des témoins physiques de leur existence dans les paysages alimentaires canadiens et états-uniens – les plus petits restaurants ne peuvent peut-être pas concurrencer au même niveau. Menus, cartes d’affaires et une entrée dans un bottin téléphonique ou un annuaire de la ville peuvent être les seules traces de leur existence. Qu’est-ce qui a de la valeur et qu’est-ce qui devrait être préservé ? Prendre en compte ce qui est mis à l’écart, ce qui reste non vu ou non entendu est aussi important politiquement que de savoir qui peut produire, créer et distribuer du contenu d’archives. - Karen Tam
Karen Tam est une artiste dont la recherche met l’accent sur différentes formes de construction et de représentation des cultures au moyen d’installations dans lesquelles elle recrée des espaces de restaurants chinois, de bars à karaoké, de fumeries d’opium, de magasins de curiosités et d’autres sites de rencontres culturelles. Depuis 2000, elle a exposé et participé à des résidences au Canada, en Irlande, au Royaume-Uni, en Autriche, en Allemagne, aux États-Unis et en Chine, dans des endroits tels que The Drawing Center (New York), le Victoria & Albert Museum (Londres), le Musée d’art contemporain de Montréal et le Irish Museum of Modern Art. Elle a été finaliste pour le Prix en art actuel du Musée des beaux-arts du Québec en 2016, ainsi que pour le prix Sobey pour les Arts en 2010, puis de nouveau en 2016. Ses prochaines expositions auront lieu à la Art Gallery of Greater Victoria (Colombie-Britannique), à Expression, Centre d’exposition de Saint-Hyacinthe (Québec), et au Musée régional de Rimouski (Québec).
Tam détient une maîtrise en arts visuels en sculpture du School of the Art Institute of Chicago et un doctorat en Cultural Studies de Goldsmiths (University of London). Ses œuvres font partie des collections du Irish Museum of Modern Art, de la collection Prêt d’œuvres d’art du Musée national des beaux-arts du Québec, de la Caisse de dépôt et placement du Québec, d’Hydro-Québec, de la Banque d’art du Conseil des arts du Canada, et du Groupe financier RBC, et sont collectionnées par des particuliers au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni. Elle est représentée par la Galerie Hugues Charbonneau.
…Recipe books, booklets, plates, glasses, teacups, teapots, chopsticks, ashtrays, swizzle sticks, bowls. Dining-in menus. Take-out menus. Souvenir menus. Souvenir photos. 4×5” negatives. Matchbooks, postcards, souvenir fans, trade cards, business cards, greeting cards, boxes, bags, napkins, fortune slips. Vinyl records, sheet music. Vintage Chop Suey games, neon signs. Red vinyl chairs, cash registers, polyester uniforms, t-shirts and chopsticks, lanterns. Coffee machine, meat grinder. Newspaper clippings, posters, coupons, raffle tickets…
Found in the home, in the basement, in the back of closets, in the attic, even in dust-covered boxes piled high in the garage, the archival materials of Chinese restaurants are the traces of lives spent behind in the kitchen, at the front in the dining rooms, of nights “slumming” in Chinatown while chowing down egg rolls and chop suey, of festive or special occasions, of petty disputes, legal notices, break-ins, hold-ups, and even murder. My collection of Chinese restaurant memorabilia took shape at around the same period when I began making artwork using the Chinese restaurant as a subject, prompted by my parents’ decision to sell their restaurant. As a way of trying to hold on to a place and environment I grew up in, I began to document our restaurant through photographs, videos, drawings, etc. I produced artwork based on Chinese restaurants and at each place where I presented this work, I would connect with the local Chinese community and collect their stories, memories, family photos, and souvenirs of their time running restaurants. Over the years, I have augmented my collection by asking restaurants, retirees, friends and relatives for any spare menus or restaurant memorabilia, and purchasing matchbooks, postcards, newswire photos, and cookbooks off eBay. In some small way, I wanted to contribute and to capture the history and experiences of the restaurant communities I have come across.
Perhaps in collecting and creating an archive of these materials, not considered to be important enough to make it into an official version of history yet, they can be seen as counter-archives and acts of resistance to what has been erased, left out, and interpreted in public histories. As souvenirs of an ‘exotic’ place and of an experience of such spaces, these restaurant objects stand in for the absent racialized bodies and communities, raced by their location and purpose. In the storefront windows of the Chinese restaurant, there is a simultaneous seeing in and seeing out of what is on display and what is offered up to gaze. In re-presenting the ephemera in the the SIGHTINGS cube, a site not dissimilar to the exhibition vitrines and art displays at international airports where individuals are in transit and in between places, they are given a new life and can offer the chance to construct new meanings and new stories. Whether public or personal, collections and archives of these souvenirs can prove to be effective aids to comprehending the historical spaces of Chinese restaurants.
In choosing to examine places of commerce where the exotic has been domesticated and served up to meet the desires and needs of the visitor-tourist, I offer a gesture towards the reconceptualization of a dominant discourse (or a lack of it) on these hybrid Chinese places, and towards redressing the underrepresentation of Asian Canada in historic scholarship and archives. How may a collection such as this be linked to the neighbourhood surrounding Concordia University that has a large Asian presence? How did the menus and other printed materials change to reflect the demands of the time? What can be gleaned from materials like menus and postcards about restaurants and nightclubs? What can be read into the text, language, and imagery used? How can the collecting of restaurant souvenirs, photographs and ephemera expand Lily Cho’s notion of the “archives of Chineseness” and act as remnants and evidence of the overseas Chinese restaurant culture as well as the building of a diasporic identity? Although most of the larger and more successful establishments could afford to promote themselves with newspaper ads, television commercials, postcards, matchbooks, etc. all of which now provide physical evidence of their existence in the Canadian and American foodscapes, smaller restaurants might not be able to compete at the same level. Menus, business cards, and a listing in the phone book or city directory might be the only trace of their existence. What is worth or what should be preserved? What is left out or left unheard and unseen is as important politically as who can produce, create, and distribute archival content. - Karen Tam
Karen Tam is an artist whose research focuses on the various forms of constructions and imaginations of cultures through installations in which she recreates the spaces of Chinese restaurant, karaoke lounges, opium dens, curio shops and other sites of cultural encounters. Since 2000, she has exhibited her work and participated in residencies in Canada, Ireland, UK, Germany, Austria, USA, and China, in venues such as The Drawing Center (New York), Victoria & Albert Museum (London), Musée d’art contemporain de Montréal, and the Irish Museum of Modern Art. She was a finalist for the Prix en art actuel from the Musée national des beaux-arts du Québec in 2016 and shortlisted for the Sobey Art Award in 2016 and 2010. Upcoming exhibitions will be held at The Art Gallery of Greater Victoria (BC), Expression, Centre d’exposition de Saint-Hyacinthe (QC), and Musée régional de Rimouski (QC).
Tam holds a MFA in Sculpture from The School of the Art Institute of Chicago and a PhD in Cultural Studies from Goldsmiths (University of London). Her work is in the collections of the Irish Museum of Modern Art, Collection Prêt d’œuvres d’art du Musée national des beaux-arts du Québec, Caisse de dépôt et placement du Québec, Hydro-Québec, Canada Council for the Arts Art Bank, RBC Groupe financier, and in private collections in Canada, the United States, and the United Kingdom. She is represented by Galerie Hugues Charbonneau.
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