« ÉGOPORTRAIT OU L’ERRANCE DES OISEAUX »
9 fév au 12 mars | Feb 9 to March 12
vernissage 9 fév 17h00 | Feb 9 ~ 5:00PM
galeriedominiquebouffard.com
Eddy Firmin dit Ano, 2016, faïence, porcelaine, or et métal, 172 x 42 x 51 cm
« De la récolte d’épices aux soldes commerciaux, l’histoire de l’esclavage se répète-t-elle inlassablement? » Avec l’exposition « Égoportrait ou l’errance des oiseaux », l’artiste Eddy Firmin dit Ano soulève la question. Armé d'humour et d'autodérision, il interroge néanmoins sérieusement le concept de liberté lié à la société de consommation dans laquelle nous baignons.
C'est à l'UQAM que l'artiste franco-caribéen a choisi d'approfondir son processus de création au cours des cinq dernières années par le biais du programme de doctorat. En réponse à une quête identitaire faisant écho à celle inhérente au Québec, l'essence de sa recherche consiste à réinterpréter la philosophie d’une pratique d’art inventée par les esclaves des îles de Guadeloupe: le Gwoka. Le Gwoka est la musique de résistance inventée par les esclaves. C’était un moyen de fuite, d'évasion et de communication, au même titre que la langue créole guadeloupéenne.
« From the spice harvest to retail sales, does the history of slavery unremittingly repeat itself? » This is the question raised by artist Eddy Firmin in the exhibition « Égoportrait ou l'errance des oiseaux ». With self-deprecating humour —but still earnestly enough—, he interrogates the concept of freedom tied to the consumer society in which we are steeped.
It is at UQAM that the Franco-Caribbean artist has chosen to deepen his creative process over the last five years by way of a doctoral program. In response to a quest for identity that finds echoes in that of Quebec, the essence of his research consists in reinterpreting the philosophy of Gwoka, an art practice invented by the slaves of the Guadeloupe islands. Gwoka is the resistance music invented by slaves. It was a means of flight, of escape and of communication, just like Guadeloupe’s Creole language.
Comme il est exceptionnel que des objets d’esclaves transmettent des indications sur leurs savoirs intelligible ou sensible, puisque toutes les formes d'expression étaient interdites aux esclaves, la pratique du Gwoka se présente comme un véritable atlas. Il contient un savoir sur le monde fragmenté et camouflé en plusieurs « disciplines » (musique, danse, chant, conte), et surtout en plusieurs rythmes. Cette approche se mouvant entre vie quotidienne, art et savoir brouillait considérablement les systèmes épistémologiques auxquels se référait le colon de l'époque.
Dans sa pratique, Eddy Firmin matérialise ses réflexions avec un savoir-faire exceptionnel. Le dessin, la sculpture (notamment son travail de céramique), l'installation, la vidéo, la performance et l'écriture constituent des moyens par lesquelles il communique sa pensée. Les méthodes sont certes multiples, mais en aucun cas superficielles ou non maîtrisées. L'œuvre témoigne en elle-même de l'expérience et du métier. Pour lui, les notions d'artiste ou de multidisciplinarité vont à l'encontre de certaines valeurs ancestrales.
« Toutes mes pratiques se nourrissent mutuellement tout en maintenant leurs jeux d’équilibre précaires. Il m’est difficile de dire quelle pratique est la plus importante ou la plus centrale.» — Eddy Firmin
Enfin, fidèle à l'esprit du Gwoka, Eddy Firmin a inventé une série de signes constituant un alphabet qui lui permet de se soustraire à la «colonialité du savoir »1. Ces codes qui échappent à la compréhension du non-initié ponctuent l'exposition et servent de titres aux œuvres présentées.
Depuis 2014, le Gwoka est inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité. C'est avec grand bonheur que la Galerie Dominique Bouffard accueille l'exposition de cet artiste qui, avec esprit et originalité, propose une réflexion pertinente sur nos sociétés contemporaines.
Originaire de la Guadeloupe, Eddy Firmin est diplômé de l’École Supérieure d’Art du Havre et de l’Institut Régional d’Art Visuel de la Martinique. Il est actuellement doctorant à l'UQAM en Études et pratiques des Arts, programme qu’il terminera en 2017. Signe de la reconnaissance de son milieu, il fut boursier du DRAC (Bureau régional du ministère français de la Culture) à plusieurs reprises et en 2011 se voyait confier la refonte visuelle des vitraux de la Cathédrale Notre-Dame de la Guadeloupe. En 2003, son livre L'Élévation est publié aux Éditions Ibis Rouge. Depuis 2006, avec son projet Terra Incognita, il a entrepris un cycle international de résidences d’artiste au Japon, en Espagne, au Zimbabwe et en France. Sa pratique amalgamant sculpture, dessin, arts numériques et performance y interroge le récit d'art au fondement de sa culture caribéenne. Ses œuvres font partie de plusieurs collections publiques en France et en Guadeloupe, notamment au MACTe (Musée caribéen d'expressions et de mémoire de la traite et de l'esclavage, inauguré en mai 2015).
- « Egoportrait ou l’errance des oiseaux », sujet de pratique et typologie - Eddy Firmin dit Ano
Since it is only exceptionally that slaves’ objects transmit indications of their mental or sensory know-how, all forms of expression being forbidden to slaves, the practice of Gwoka presents itself as a veritable atlas. It contains knowledge on a fragmented world, concealed in several “disciplines” (music, dance, song, tales), and above all in several rhythms. This approach, straddling as it did daily life, art and knowledge, considerably confused the epistemological systems available to colonists at that time.
In his practice, Eddy Firmin materializes his reflections with exceptional skill. Drawing, sculpture (especially his work in ceramics), installation, video, performance and writing are all means by which he communicates his thought. The methods are varied, to be sure, but in no way superficial or tentative. The work itself speaks volumes about his experience and technique. For him, the notions of the artist or of multidisciplinarity run counter to certain ancestral values.
« All my practices feed off each other even as they maintain their precarious balance combinations. It is hard for me to say which practice is the most important or the most central. » —Eddy Firmin
Finally, true to the spirit of Gwoka, Eddy Firmin has invented a series of signs making up an alphabet that allows him to eschew any sense of the « coloniality of knowledge »1. These codes that evade the understanding of the uninitiated appear throughout the exhibition and provide the titles of the works presented.
Since 2014, Gwoka is registered as part of the immaterial cultural heritage of mankind. Galerie Dominique Bouffard is very happy to host the exhibition of this artist who, with wit and originality, puts forward a relevant reflection on contemporary society.
A native of Guadeloupe, Eddy Firmin is a graduate of the École Supérieure d’Art du Havre and of the Institut Régional d’Art Visuel de la Martinique. He is currently a doctoral student at UQAM in Études et Pratiques des Arts, a program he will be finishing in 2017. Well-respected in the art community, he received several bursaries from DRAC (the regional bureau of the French Ministry of Culture) and was entrusted in 2011 with the visual reworking of the Cathedral of Notre-Dame de la Guadeloupe. In 2003, his book L'Élévation was published at Ibis Rouge. Since 2006, with his project Terra Incognita, he has launched upon an international cycle of artist residencies in Japan, in Spain, in Zimbabwe and in France. Ever since then, his practice amalgamating sculpture, drawing, digital arts and performance has been interrogating the art narrative at the basis of his Caribbean culture. His works belong to several public collections in France and in Guadeloupe, e.g. at the MACTe (Centre caribéen d'expressions et de mémoire de la traite et de l'esclavage, inaugurated in May 2015).
- « Egoportrait ou l’errance des oiseaux », sujet de pratique et typologie - Eddy Firmin dit Ano
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