« ENTRE L'ESTHÉTISME ET LA RÉFLEXION »
Commissaire : Marie-Josée Rousseau
en collaboration avec Art Souterrain
jusqu'au 19 mars | until March 19
lacastiglione.ca
JUDITH BELLAVANCE
La ménagerie de Hope. Dans ce cabinet de curiosités réunissant des éléments naturels, sont collectionnés des morceaux d’êtres vivants; insectes, oiseaux, porcs-épics, poissons. Disséqués, il ne subsiste d’eux que les têtes, pattes, ailes, poils et griffes.
GUY LAVIGUEUR
Depuis plus de 20 ans, Guy Lavigueur survole la planète bleue à la recherche de «signatures terrestres». En fait, tout son art se décline à la fine frontière du documentaire et de l’imaginaire par des jeux d’abstraction, d’associations et de dérivatifs.
ALAIN PRATTE
Alain Pratte conçoit la photographie comme un langage qui vise non pas à restituer le réel tel qu’il est, mais à utiliser le matériau brut qu’est le monde visible pour construire à partir de lui un espace métaphorique, un lieu où les images s’interpellent, se répondent les unes les autres et finissent par former une nouvelle réalité, une réalité amplifiée au point de prendre des airs d’absolu. Ou de vérité.
Deux processus se mettent en action dans l’appréciation d’une œuvre d’art : l’appel aux sens et l’amorce d’une réflexion. Le spectateur placé devant une œuvre d’art peut éprouver une variété d’émotions, allant du pur plaisir esthétique au dégoût viscéral. Il est amené à s’interroger non seulement sur ce qui est donné à voir en tant qu’objet, mais aussi sur la capacité d’évocation de l’œuvre, sa résonnance particulière suivant le vécu, la sensibilité et les connaissances de chacun.
JUDITH BELLAVANCE
Tels des pierres précieuses déposées dans des écrins, ces fragments du vivant se retrouvent isolés sur divers matériaux : tissu rose évoquant la chair, porcelaine blanche craquelée suggérant la précarité, boîte de métal voulant protéger ou cadres anciens transportant dans une autre temporalité. Le geste vise à protéger et préserver ce qui est délicat et fragile. Il accorde une valeur à ce qui est périssable. La beauté de ces formes issues du vivant se conjugue au caractère macabre de leur morcèlement, visible là où la chair a été coupée par les pinces et les ciseaux. Découpés, arrachés du flux naturel où ils évoluaient, ils deviennent objets de collection mais également traits, lignes, masses, volumes et matériaux.
Au premier coup d’œil et à distance, les multiples traits minuscules des pattes d’insectes évoquent le dessin ou l’écriture, signes et hiéroglyphes qui auraient été tracés à la main sur fond blanc. Les poils hirsutes de la patte de porc-épic et de la touffe de fourrure ressemblent à un crayonnage tandis que les ailes des papillons rappellent des découpages de papier de soie et que les ailes de l’oiseau offrent au regard un remarquable dégradé de gris. Autant de qualités picturales qui sont ici mises de l’avant par le patient travail de collecte, découpe, arrangement et prise de vue réalisé par l’artiste.
L’usage de la photographie participe du désir de préserver mais aussi de contempler et d’étudier. Elle témoigne de la rencontre initiale avec la bête morte, de l’examen et du prélèvement de ses parties et du choix de leur exposition au regard.
Judith Bellavance est titulaire d’un baccalauréat en arts visuels de l’Université Laval. Elle a participé à de nombreuses expositions individuelles et collectives à travers le Québec et à l’étranger. Ses œuvres font partie de collections privées et publiques dont le Musée national des beaux-arts du Québec, la Bibliothèque nationale du Canada, l’Université Laval, la Ville de Montréal et la collection Loto Québec.
GUY LAVIGUEUR
Parce que la photographie tire sa première légitimité de sa capacité d’imitation de la nature encore plus parfaite que celle de la peinture, on la remet rarement en question. À travers l’œil de Guy Lavigueur, sis à 3000 pieds d’altitude, nous explorons la physionomie des paysages miniers et des sables bitumineux. Loin des détonations et des odeurs de bitume, ces œuvres pluridimensionnelles et polysensorielles nous fascinent et subliment notre expérience du réel. Notre regard se perd dans l’océan de formes et de couleurs que recèle notre planète. Le paysage ici se mue en une empreinte dont la pérennité est sans cesse mise à l’épreuve. Une invitation à examiner ses caractéristiques les plus profondes.
Guy Lavigueur cherche tout d'abord à surprendre et choisi soigneusement de cadrer en dehors de tout indice qui "expliquerait" l'image au premier chef, qui aiderait à définir l'échelle, le lieu, ou même l'état liquide ou solide de la matière. Il s’inspire des mouvements et de l'esthétique de la peinture abstraite.
Il a participé à de nombreuses expositions solos et collectives, ici et à l’étranger, notamment Art Souterrain, en 2016 et l’exposition «Grandeur nature» à Paris, en 2015. Ses photographies font partie de plusieurs collections privées et publiques dont celles de la Ville de Montréal, de la Fondation Auer en Suisse et du Musée de la photographie de Charleroi en Belgique.
ALAIN PRATTE
Chacune des séries photographiques qu’il réalise est une invitation au voyage, un voyage dans un monde inventé construit avec des bribes de réalité. Il n’y a pas d’art sans séduction et même la provocation, pour opérer, doit se présenter sous une forme qui séduit. Sinon, elle n’est que martelage de lieux communs.
Dans la série On a marché sur la Lune, la ville semble avoir cessé d’exister, elle n’est plus qu’un amas de décombres, de traces, de vestiges, de stigmates d’une époque révolue. Ne reste plus qu’un paysage lunaire aux airs de fin du monde et des éléments épars d’une société disparue à partir desquels on peut se livrer à diverses conjectures sur la réalité sociale de cette humanité éteinte quitte à s’interroger au passage sur les fondements de l’existence à une époque où la fameuse question « Qu’est-ce qui fait courir les hommes ? » se pose à chaque instant.
Depuis 1973, Alain Pratte a réalisé de nombreux projets photographiques parmi lesquels plusieurs ont fait l’objet de publications et d’expositions au Canada et à l’étranger dont, le Musée d’art contemporain de Montréal et le Musée canadien de la photographie contemporaine à Ottawa. Ses œuvres figurent dans la collection publique du Musée des Beaux-Arts de Montréal.
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