« EMPIRE, VOUS AVEZ DIT EMPIRE ? »
jusqu'au 24 jan | until Jan 24
Maison de la culture du Plateau-Mont-Royal
« Le capital est semblable au vampire, ne s’anime qu’en suçant le travail vivant et sa vie est d’autant plus allègre qu’il en pompe davantage »
- Karl Marx
Le mot Empire éveille l’imaginaire. Visions de gloire, de grandeur, de richesse, de puissance et de domination, il soulève également son revers, des images de déclin, d’effondrement, de disparition, d’oppression et d’exploitation. Les œuvres présentées au sein de cette exposition, loin de se dresser dans un habit majestueux, se présentent dans un état qui se rapproche de la dématérialisation. Empire, vous avez dit empire ? combine plusieurs éléments épars qui renvoient aux cycles passés, présents et futurs de destruction et de régénération.
Face à l’entrée, deux colonnes grises, imposantes de par leur grandeur, s’érigent au centre de l’espace. Trônant tout en haut, des amas de roches grises, comme des minerais précieux, sont soutenus par des chaines argentés. D’un côté de la salle, fragmenté en quatre grands tableaux démantelés, une sorte de paysage ténébreux forme une ligne d’horizon. Sur chacun des tableaux, flottants comme des fantômes, des murs émergent et nous bloquent la vue. Les constructions introduisent un élément d’incertitude, une impression de présence indestructible et énigmatique qui se trouve accentuer par les arrière-plans déserts. Des coulures, formées de peinture et de poussière, parsèment le bas des tableaux, sorte de mémoire d’actions passées, d’ombres fugitives et abstraites sur le point de se dissoudre. De l’autre côté de la salle, 12 drapeaux blancs identiques se déploient, alignés comme à la parade. Facsimilés en plâtre et semblables en tous points, les drapeaux pourraient esquisser l’idée de domination et d’unification du monde par un seul pouvoir et celle, moins florissante et plus glaçante, de sa démesure, de ses fabulations, de son caractère construit et de ses faux-semblants.
L’ensemble des œuvres se présente dans un aspect brut et déliquescent. Il y a quelque chose de l’ordre de la destruction et de la ruine, les diverses composantes font figure de débris et s’opposent au caractère immortel des œuvres d’art. Les minerais pourraient se rapprocher du statut de la ruine romantique ou de fragments précieux qui rappellent notre mortalité et la caducité des biens terrestres. La ruine, symbole par excellence de l’origine et de la fin, de la transformation et du passage irrévocable du temps, se montre à la fois séduisante et mélancolique.
Simon Bilodeau témoigne avec cette proposition du processus d’érosion et de dégradation des structures et des constructions humaines. Le titre de l’exposition, inspiré du film culte Vampire, vous avez dit vampire, pourrait faire allusion à la fois à la figure de l’altérité et du monstrueux ou encore à celle de l’artiste, à son isolement et à sa conquête perpétuelle. - Anne Philippon
Né en 1981 à Laval, Simon Bilodeau vit et travaille à Montréal. Il a obtenu une maîtrise en arts visuels et médiatiques à l'Université du Québec à Montréal en 2013. Par la réalisation de travaux et par leur destruction, il a la conviction que celle-ci rend possible une lecture de l’inaccessible, qu’elle permet de faire apparaître un certain invisible. Il est représenté par la galerie Art-Mur à Montréal et par la galerie Circuit12 contemporary à Dallas.
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