Au coeur des sciences
Alison Reiko Loader, Malacosoma disstria I, 2013, Projection vidéo (technique “timelapse”, temps réel, prise de vue image par image et “microscopie”), Table, livrées des forêts, spécimens de papillons de nuit: papillons de nuit, papillons de nuit disséqué, ailes de papillons de nuit, tubages de pupes, oeufs, masse d'oeufs (décolorés et écrus).
En collaboration avec Jessica Ethier, doctorante au département de biologie à l’Université Concordia, dans la laboratoire bioart Fluxmedia dirigé par la professeure adjointe Tagny Duff et le laboratoire d'entomologie dirigé par Dr. Emma Despland. Ce projet reçoit le soutien du Mobile Media Lab (Kim Sawchuk) et The Centre for Digital Arts.
De la Nature est une exposition qui flirte avec la science. Pour le spectateur, cette visite de laboratoire qui n’en est pas un, peut s’avérer complexe de prime abord. Voici quatre raisons pour prendre le temps de s’attarder un peu plus entre les murs de la galerie Les Territoires et découvrir de nouvelles alliances entre l’art et la science.
De la nature, vue d'exposition.
Approcher le monde secret des laboratoires
Les artistes sélectionnés par la commissaire Anne-Marie Belley sont issus du groupe de recherche Fluxmedia. Établi localement à l’université Concordia, ce réseau international est dédié aux recherches qui croisent art et sciences du vivant. Chacun a mené son projet artistique en collaboration avec des biologistes, entomologistes ou encore des ingénieurs. Cet échange de savoirs vient nourrir chacune des œuvres présentées, si bien que les références scientifiques et artistiques deviennent ne peuvent se distinguer.
Alison Reiko Loader, Malacosoma disstria, 2013, video projection (timelapse, live action, stopmotion, microscopy), Table, magnifying loupe, forest tent caterpillar, moth specimens: moths, dissected moths, moth wings, pupae casings, eggs, egg masses (bleached and unbleached).
Filmed with collaborator Jessica Ethier, PhD candidate, Biology Department, Concordia University in a Fluxmedia bioart lab given by Assistant professor Tagny Duff and Dr. Emma Despland’s entomology lab. The work is supported by the Mobile Media Lab (Kim Sawchuk) and the Centre for Digital Arts.
Faire de l’exposition un terrain d’expérimentation unique
Si les artistes entrent désormais dans les laboratoires pour en puiser la matière de leur œuvre, les scientifiques se retrouvent, quant à eux, mis à contribution dans le processus de création. L’exposition devient un terrain d’expérimentation idéal où convergent leurs recherches. Claire Kenway associe son œuvre au travail du biologiste Chris Elvidge pour observer le comportement de poissons placé dans un aquarium in situ. Le lieu d’exposition se retrouve au cœur du processus, car sans ce temps et ce lieu unique les œuvres ne pourraient exister. Pour trois d’entre-elles, De la nature est la première et l’unique présentation.
De la nature, vue d'exposition.
Déconstruire notre image de l’artiste
Loin de l’image romantique de l’artiste œuvrant en solitaire dans son atelier, l’exposition propose un portrait bien différent des artistes actuels. Ici, l’artiste s’appuie sur des données scientifiques, manipulent les instruments de laboratoires – pétris, microscope, spécimen – et met en jeu des hypothèses scientifiques. Ces pratiques transversales, faites de rapprochements et de confluence des domaines, nous rappellent les limites à repousser d’un monde de l’art qui se suffit à lui-même.
Brandon Ballengée, Styx XIV, 2009-2013, Trois grenouilles vertes diformes préservées, dégagées et tâchées trouvées dans le sud du Québec, placées sur un table lumineuse. Ces spécimens font partis des recherches en cours menées par Brandon Ballengée, David M. Green et Stanley K. Sessions sur la fréquence et les causes des malformations au sein des populations d'amphibiens anoures dans le sud du Québec. 11cm X 11cm X 6cm, Collection du Musée Redpath, Université McGill. Avec l’aimable autorisation Ronald Feldman Fine Arts, New York, NY.
Stimuler notre curiosité universelle
Derrière les dispositifs scientifiques pointus, allant d’une imprimante 3D tentaculaire (Kelly Anders) à un aquarium sonore sophistiqué (Claire Kenway), se cache le moyen très simple de toucher notre curiosité la plus immédiate et humaine : celle qui nous portons au vivant. Non sans évoquer les curiosa collectionnés par les amateurs éclairés depuis la Renaissance, les œuvres de Brandon Ballengée ou encore de Alison Reiko Loader sont portées par ce même désir de collecte de spécimens de la nature qui a vu naître les cabinets de curiosité et les premiers musées.
Claire Kenway, Acousticaquatica, 2013, Installation acoustique, 100 poissons Tetra Cardinal (Paracheirodon innesi), eau distillée de laboratoire, aquarium en plexiglas, base en acier, gravier bleu et blanc, modules lumières à LED, 4 haut-parleurs, 6 hydrophones, amplificateur, ordinateur, système de filtration, plantes, châteaux miniatures, roches en plastique.
Remettre la nature à l’œuvre
Selon la commissaire, l’exposition nous invite à une conciliation entre nature et culture. Les artistes travaillent dans cet entre-deux, ramenant la nature non transformée, au cœur de l’espace d’exposition. Les poissons, spores de champignons et squelettes de grenouilles cherchent leur place au sein de ce nouveau milieu, nous obligeant à revoir nos perceptions. La place laissée à l’expérimentation et à la nature dans l’exposition, loin des critères esthétiques attendus a de quoi déstabiliser. Elle nous oblige à déplacer nos références culturelles et à nous trouver d’autres repères, plus proches de l’observation plus que de la conceptualisation.
De la nature, vue d'exposition.
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