Patrick Bérubé : artiste-commissaire (volet 2)
Michel de Broin, Trou de vers, 2010, Plâtre et fibre de verre
photos : Olivier Bousquet, Galerie SAS
Après Laurent Craste, c’est au tour de l’artiste Patrick Bérubé d’avoir carte blanche pour concevoir une exposition à la Galerie SAS. Avec Fabuleux Cercles Vicieux, l’artiste-commissaire propose une exposition en miroir de son œuvre, où plane le même esprit ludique et absurde qui caractérise son travail.
Patrick Bérubé, L'alliance, 2011, Plexiglas, bois, LEDs, impression photo numérique
Patrick Bérubé a fait une sélection d’artistes homogène et cohérente comprenant Gwenaël Bélanger, Michel de Broin, Mathieu Latulippe, Frédéric Lavoie et lui-même. Il s’est entouré de ces artistes proches de son univers, avec qui il partage affinités et influences artistiques depuis plusieurs années. Exception faite de Michel de Broin, la connivence artistique est palpable entre ces artistes québécois qui font partie de la même génération.
L'artiste-commissaire a retenu des œuvres à la plasticité avenante, voire séduisante. Ici, les artistes mettent en avant les objets dans toute leur matérialité. Ils leur font ensuite subir toute sorte de détournement et de manipulation dérisoires, afin de les rendre inopérants et d’illustrer « la métaphore de tourner en rond » définie par le commissaire.
Michel de Broin, Circulation, 1994, Câble et prises électriques
Chaque artiste est exposé dans un espace individuel. Les œuvres de Frédéric Lavoie, Mathieu Latulippe se succèdent sans se mêler dans la salle principale. Elles s’ouvrent avec une photographie isolée pour décliner ensuite plusieurs œuvres murales très différentes, deux vidéos et une sculpture. Ces deux premiers sas se concluent par l’espace arrière où se retrouvent quatre œuvres récentes de Patrick Bérubé.
Frédéric Lavoie, ALLERS-RETOURS (série), 2010, Aquarelle et dessin sur papier
La seconde salle est dédiée aux œuvres de Michel de Broin et Gwenaël Bélanger. Là encore, la séparation des artistes est respectée. Les œuvres de Gwenael Bélanger prédominent par une forte présence, notamment avec le son de la vidéo. A contrario, les œuvres de Michel de Broin opèrent simplement, avec des formes plus discrètes, exception faite de la sculpture Trou de vers. Tout comme Laurent Craste pour le premier volet de cette série d'exposition, Patrcik Bérubé n’a pas crée de confrontation physique entre les oeuvres, préférant la séparation au face-à-face des œuvres.
Gwenaël Bélanger, Comic Strip (Vert gazon 2, 3 et 4), 2011, Impression numérique au jet d’encre
L’artiste-commissaire a considéré l’exposition comme un terrain de jeu. Les cinq artistes sont réunis ici parce qu’ils ont un intérêt commun pour le ludique et sa mise en scène. Les œuvres « tantôt critiques tantôt divertissantes » sont issues d’un même geste artistique où « les artistes mettent en évidence notre bêtise et notre superficialité dans un monde qui a clairement des préoccupations beaucoup plus importantes que tous ces artifices ».
L’exposition donne ainsi une lecture identique des oeuvres où l’absurde est maître d’œuvre : « ils [les artistes] soulignent le caractère absurde des préoccupations de notre époque ». Patrick Bérubé assume ici une vision personnelle où toutes les œuvres convergent vers cette thématique centrale de son travail. Les quatre artistes usent de « stratégies de détournement, d’ironie et d’absurdité » qui se retrouvent également dans ses propres installations et sculptures. Les mêmes codes visuels et humoristiques se retrouvent de manière systématiques, par exemple dans les objets impossibles de Michel de Broin et de Frédéric Lavoie.
Patrick Bérubé, Ancrage, Céramique, encre, aluminium, bois, plomb
Fabuleux Cercles Vicieux offre au public une sélection d’artistes de qualité. L’exposition est cohérente grâce aux liens forts qui existent entre les œuvres. Elle est un spectacle efficace et réjouissant grâce à ce parti pris de Patrick Bérubé qui a su exploiter l’absurde chez des artistes qui ont parfois une approche très éloignée de cette forme d’humour. Rassemblée sous cette bannière, l’exposition n’échappe pas à une certaine uniformité. On aurait aimé être bousculé davantage et voir une prise de risque dans la manière dont l’artiste-commissaire peut s’approprier le médium de l’exposition.
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