« THESE THINGS TAKE TIME »
jusqu'au 24 déc | until Dec 24
larochejoncas.com
Harvey est un jeune peintre prometteur qui explore et revisite des questions reliées à la représentation ainsi qu'à la figuration en peinture. Son travail a récemment été le sujet d'une exposition solo au printemps 2011 à la Galerie des Art Visuels de L'Université Laval à Québec. Au début 2011, ses oeuvres faisaient également partie de l'exposition 'Compossibilité(s) présentée à la galerie également.
Harvey is an an exciting young painter that explores and revises issues of abstraction and figuration in painting. The artist's work was recently the subject of a solo exhibition at the Galerie des Art Visuels, Université Laval in Québec City. His work was also featured in the group exhibition 'Compossibilité(s)' presented at the gallery in 2011.
« Ces choses que l’on crée » Peindre est une fiction que l’on recommence sans cesse. Peut-on devenir plusieurs peintres à la fois? La peinture débute en atelier, dans ce que l’on laisse derrière soi, parfois inachevable. Ne faut-il pas d’abord avancer à travers ce que l’on s’imagine interdit?
Le travail de l’artiste confronte un corps en mouvement. Des toiles au sol, sur les murs, dans un espace en désordre, s’accumulent. Il y a sur ces tableaux : des gestes, des doutes, des paradoxes, des bruits de combats avec soi-même, un désir de reprendre depuis le début, de n’avoir aucune crainte et, surtout, de ne faire qu’un avec l’environnement immédiat.
Le figuratif est une autre parole venue de l’abstrait. La toile peut contenir ce que le regard et la mémoire s’échangent. On retrouve donc nécessairement des ratures, des lignes, quelques dessins approximatifs et, pourquoi pas, aucune délimitation franche.
Un soir, j’ai observé les œuvres de Jean-Philippe Harvey comme on écoute les pièces d’un album. Cela dure environ 40 minutes. Tout s’enchevêtre ; effets minimaux, craquements omniprésents, textures à peine audible, un futur inouï. Ses toiles contiennent de l’espace, une réflexion en cours, jamais stable, toujours prête à se redéfinir, des codes gribouillées, de la pornographie peut-être, mais il faut prendre le temps nécessaire.
‘Je ne suis pas certain de vouloir dire la vérité’, comme l’écrit Ariana Reines dans The Cow, «It is not easy to be honest because it is impossible to be complete». Cette peinture exprime des choses manifestement inadmissibles et douteuses, parfois un appel à l’autodérision sincère.
Certaines toiles sont plus prosaïques que d’autres. Il fait référence à Morrissey, Lautréamont ou Bonnard. Jean-Philippe Harvey a-t-il lu Elle, par bonheur et toujours nue de Guy Goffette? «Bonnard n’a eu qu’un tort, c’est de persister à devenir lui-même, à n’être que soi, mais totalement ; de dire à haute voix ce que la plupart n’osent plus penser : que le bonheur existe, et l’amour et la beauté, que ce n’est ni d’avant ni d’arrière garde, et qu’il est sacrément bon de ne chercher que cela. Au fond de soi. Tout au fond». Comment capter chez l’autre son propre reflet?
Je n’ai pas vu l’exposition et je ne la verrai peut-être pas. Il existe pourtant une histoire derrière cette série de tableaux. J’en suis certain. Je me rappelle des tâches d’acrylique, d’huile, des dizaines d’agrafes sur le tapis d’un atelier pêle-mêle, des pinceaux, un rouleau et de la peinture verte, là où repose deux grandes toiles qui sont l’envers, ainsi que l’endroit d’une même pratique radicale. J’imagine l’artiste qui rêve à une toile plus noire que noir.
- David Cantin (octobre 2011)
"Those things we create"
Painting is a fiction that the artist continuously renews. Can an artist become many painters at once? Paintings start in the studio, with what the artist chooses to leave behind him. Sometimes they are simply impossible to finish. Shouldn’t it be better to venture through what is imagined forbidden?
The work of the painter confronts a body in motion. Canvases on the floor, on the walls, in a chaotic space accumulate. There is on the canvases gestures, doubts, paradoxes, noise of the painter fighting with himself, a desire to restart from the beginning, to transgress without fear, to be at one with the environment.
Figurative painting is another voice that originated from abstraction. The canvas can only contain what the gaze and memory trade each other. We necessarily finds erasures, lines, a few approximate drawings and why not, no clear delineation.
One night, I observed the works created by Jean-Philippe Harvey just like I listen to the songs from an album. That lasts about 40 minutes. Everything gets mixed up; minimal effects, omnipresent cracklings, textures barely audible, an incredible future ahead. His canvases contain space, a reflection, never stable, always ready to redefine themselves, codes difficult to make out, pornography perhaps, necessary time to decipher is needed.
'I’m not certain to want to say the truth' wrote Ariana Reines in ‘The cow’ ‘’It is not easy to be honest because it is impossible to be complete’’. This work expresses truths often inadmissible even dubious at time, a call to an authentic self derision.
Certain works are more prosaic than other. Jean-Philippe Harvey makes references to pop star Morrissey, writer Lautréamont or painter Bonnard. Has Jean-Philippe Harvey read ‘Elle, par Bonheur et toujours nue’ by Guy Goffette ? ‘’Bonnard only had one flaw, to persist wanting becoming himself, to be only himself, but totally ; to say out loud what most don’t even dare think; that happiness exists, and love and beauty, that it isn’t a more or lesser priority, and that it is frankly good to search for nothing else. At the bottom of ourselves, way at the bottom.’’ How to capture in the other our own reflection.
I have not seen the exhibition; maybe I won’t even see it. A story exists behind this series of paintings. I am certain. I remember the acrylic and oil color spots, dozens of staples on the carpet of a congested and chaotic studio, some brushes, a roller and some green paint, where rests two large canvases that are upside down, as well as a radical practice standing at the right position. I imagine the artist dreaming of a black canvas more black that black.
- David Cantin (October 2011)
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