Dustin Wilson : cartographie des impossibles
par Claire Moeder
photos : Benoit Pontbriand
Retour au point d’origine de Dustin Wilson décline une fiction future de la région du Nouveau-Brunswick. Composé à partir de recherches scientifiques, le projet présenté à Skol opère à la jonction de données réelles et d’une vision fantasmagorique, où l’exposition vient croiser une timide science-fiction.
Retour au point d’origine se base sur des données collectées au fur et à mesure des investigations de Dustin Wilson. Tenu avec la régularité d’un journal de bord, le projet continu de l’artiste réunit diverses mesures et codes topographiques de la région du Nouveau-Brunswick qui étudient la montée des eaux, l’érosion et la progression des bandes sablonneuses sur une projection de 500 ans.
L’exposition propose un accrochage éclectique où se croisent dessins colorés, diagrammes, cartes aériennes décrivant une vaste topographie de lieux isolés. Composée majoritairement d’œuvres papier de petites dimensions, l’exposition guide le spectateur à travers un réseau dense et régulier de dessins suspendus grâce à des filins. Le temps et le lieu sont figurés par le biais d’un accrochage linéaire, formant une séquence narrative rigoureuse. Un récit se déroule progressivement à travers la série de paysages vides où l’artiste a intégré divers personnages et objets issus de son imagination. Des silhouettes mi-animales et humaines –mêlant bande dessinée et légende populaire-, ou encore un bus suspendu dans les airs, contaminent avec humour les relevés scientifiques qui servent de support à l’artiste. Devenu fantasmatique et irréel, le paysage oscille entre une mythologie personnelle et une cartographie objective, issue de documents authentiques.
Les cinq ensembles de dessins de l’exposition sont associés à des lignes schématiques et colorées. En créant une jonction de chaque élément entre eux, cette composition abstraite placées au sol et au mur propose une navigation en trois dimensions dans la salle de l’exposition. Le regard passe dès lors d’une œuvre graphique et bidimensionnelle à une installation globale. L’efficacité du graphisme et de la répétition des motifs au mur se disperse dans la totalité de l’espace. La lecture, scandée avec méthode grâce à l’alignement des feuilles au mur, se transforme en une démarche multiforme où s’intercalent œuvres vidéos, graphiques et installatives.
Les équations géographiques et temporelles sont réexaminées à travers le prisme de l’artiste. Il anéanti volontairement tout discours scientifique pour lui préférer une vision fantasmagorique. Les éléments sont tour à tour remaniés et déplacés vers une géographie mentale, inspirée de sa région natale. L’exposition devient un lieu fictif et glissant où l’artiste joue des marqueurs de lieu et temps afin de récréer un territoire impossible du futur.
Commentaires