« PORTRAITS DE CEUX QU’ON N’A JAMAIS CONNUS »
17 oct au 14 nov | Oct 17 to Nov 14
vernissage 17 oct 14h00 | Oct 17 ~ 2:00PM
galerie René Blain : 7905 San Francisco ~ Brossard
Le thème de l’identité est traité par le biais de 50 portraits contemporains semi figuratifs sur divers supports : la peinture, le dessin, la sculpture et l’installation. Un thème identitaire qui témoigne des questions soulevées par notre société actuelle : le nomadisme, l’exode ou l’immigration, et la coupure avec les cultures d’origine qui en résulte, mais aussi des questions d’éthique contemporaine : exclusion et différence, adoption et dépossession identitaire, vieillissement et perte de patrimoine.
Être d'ici quand on vient d'ailleurs ? Comment appartenir quand on est issu d’une autre culture, devenu citoyen d'un autre pays, né orphelin pour devenir adopté ? Comment appartenir quand on est étranger, métissé, minoritaire, différent ? Comment définir qui je suis quand d’où je viens est une imbrication complexe de diverses histoires et cultures ?
Pour explorer ces questions, Nadia Nadège conduit une nouvelle recherche esthétique depuis septembre 2008 en s’appuyant sur le thème du portrait. Ses personnages sont d’abord croqués sur carnets, à partir de modèles vivants minutes dans les gares, les aéroports, les places publiques : ces endroits de passage où tant de gens se croisent sans vraiment se voir, ces lieux de transfuge où, anonyme, l'on peut se sentir partie intégrante de la marée humaine, ces lieux de départ familiers pour les nomades, les voyageurs, les migrants et les errants.
Ses personnages ont des visages flous, des regards disparus, des bouches muettes, des postures saisies dans leur torsion figée en plein mouvement, de ces retournements d'épaules et de nuques comme pour répondre à un appel ou réagir à la surprenante arrivée d’un inconnu sur son territoire. Ils sont aussi en quête d’eux-mêmes, cherchant leur place dans un monde informe car nouveau, encore à l’état indéfini de passagers en transhumance, d’adoptants en voie d’être adoptés, de mystères sur le point de se révéler. Personnages qui ont cette présence remarquable issue d'une puissance émouvante, d'une expressivité forte, d'une composition ancrée… accentuées par la texturation brute des supports, par l’utilisation vibratoire des couleurs, par la gestuelle saccadée que l'on devine à travers les coups de spatule ou de pinceaux écrasés sur la toile ou le papier.
Il émane des oeuvres un questionnement, par l’impossibilité d’identifier clairement les faces ou les trois-quarts de visages, dans un effort constant de reconnaissance, dans un effort pour nommer l'innommable : l’absence de racines, l’absence de modèles, l’absence de parentalité, l’absence de terre ou d’ancêtres nommés. C’est l’artiste qui dit vouloir "rendre présents les absents par l'art du portrait".
Nadia Nadège parle de la différence face à la communauté. Chacun d’entre nous s'est un jour trouvé différent ou nouveau face à un groupe constitué, structuré, composé de familiers détenant le secret d’un langage codé et d’une histoire commune. On a tous vécu au moins une fois ces regards posés sur soi et ce moment de questionnement de chaque côté du terrain - tels qu'on les voit en particulier dans la fresque saisissante composée de 10 toiles collées les unes contre les autres.
Au coeur de la salle d’exposition, une installation mobile tourne lentement sur elle-même : Janus, deux portraits géants sur bois collés dos à dos, symbolise le Gardien des Portes, tel un veilleur attentif en continuelle ronde sur son territoire. Dans cette exposition, l'imagination est stimulée et les oeuvres laissent touchés, émus, rêveurs, pantois, voire fascinés. Que se passe-t-il avec cette communauté dont les membres apparaissent dans une lumière oblique ou disparaissent dans l'ombre d'une porte ?
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