[...] la situation que traversent actuellement les revues d’art. Sont-elles à l’abri de cette crise des médias ?
Premier constat, les revues au Québec semblent se porter mieux que jamais. À priori, elles sont très garnies, articles et publicités y foisonnent. On le sait, elles travaillent en grande partie avec des organismes subventionnés, ce qui, peut-être, les place à l’abri des embûches sur le plan de la stabilité. Mais audelà de l’apparence, qu’en est-il réellement ? La réalité est que pour survivre, les revues ont baissé d’au moins 50 % leurs tarifs publicitaires, et qu’elles font de nombreux échanges publicitaires. Pour ceux qui ne sont pas familiers avec cette pratique, disons que nous procédons par troc. Ce qui s’est toujours fait; mais auparavant, on publiait un échange par numéro, tandis que maintenant la chose s’est systématisée. Il faut bien accepter l’échange; sinon, de quoi aurions-nous l’air si tel organisme ou tel autre ne figurait pas dans nos pages ? Une pub dans ma revue contre une pub dans ton catalogue, une pub et des bannières sur nos sites, contre une pub et des bannières sur ton site, ta revue dans des sacs remis aux journalistes lors de conférences de presse... et toutes sortes d’autres solutions de visibilité « gratuites » qui voient le jour, témoignant du légendaire caractère de débrouille de notre milieu. Mais où est
l’argent ? Comment peut-on fonctionner et négocier quand les revues
ouvrent les écluses du non-respect d’elles-mêmes pour accommoder des
amis ?
Et pour clore ce bal carnavalesque, nous lâchons les notions d’intégrité et d’éthique qui font résonner un malaise, au moment où les lecteurs francophones et anglophones ont moins à lire dans un système qui propose la traduction et des articles écourtés, et où les intellectuels bénéficient de moins d’espace et en conséquence de moins de poids argumentaire. En temps de crise, les revues courtisent sans vergogne les nouveaux lectorats, même si elles ont moins à offrir : moins de pages, moins de parutions annuelles, moins d’articles, moins de mots, moins de visuels, et moins et moins de tout. Seul gain : beaucoup d’espace publicitaire occupé. Est-ce cela que les lecteurs veulent, des catalogues promotionnels qui font croire que tout va bien ?
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