vernissage 7 nov 15h00 | Nov 7 ~ 3:00PM
artmur.com
DAVID BLATHERWICK « DRIFTING »
* english follows (…) la peinture est interrogée tant dans sa dimension réflexive que dans sa dimension transitive, c’est-à-dire dans sa capacité à prendre en charge l’extériorité du monde et ses divers phénomènes. Cette prise sur le réel perturbe le déploiement logique de l’abstraction de sorte à la faire éclater vers des plans d’immanence multiples. Depuis ses premières œuvres des années 1990, les préoccupations formelles et référentielles du peintre ont bougé, sans toutefois rompre avec ses principes de base, le réseau et la trame, dérivés d’un rapprochement entre la toile picturale et le Web. En effet, l’exploration des systèmes relationnels et circulatoires, véritable leitmotiv du travail de Blatherwick, nous mène désormais au cœur du mystère de la biologie et de l’anatomie. De la culture virtuelle des « flux », nous passons du côté de la réalité palpable des « fluides », déplacement à travers lequel se reformule la question de l’inconnaissable. | The new work of David Blatherwick echoes the pathology of a virus and the abject fascination it engenders through the visualization of its structure. The role of the microscopic at once distances the reality of the self from the body while concurrently effectuating the very cellular processes in view, acting as a feral reminder of a site of limitless expansion, threat and creation. The task of the painter in a world defined by technology is to re-codify the medium: to be a reflective foil to a world surrounding itself. These new works situate
the limits of painting, but they are limits that are singularly defined by a function of proximity and perception.
HOLLY KING
« MANGROVES: FLOATING BETWEEN TWO WORLDS »
* english follows ~ Travail sur l’artifice et l’illusion générée, les photographies précédentes de Holly King étaient des fenêtres s’ouvrant sur des paysages composés de toutes pièces. Les maquettes fabriquées de toiles peintes, cellophane et branchages reproduisaient des lieux imaginés rappelant les natures sublimes des toiles de Friedrich et Turner. L’imaginaire du spectateur était happé par ces œuvres pour être projeté dans ces univers qui semblaient à la fois hostiles et figés, reconnus et étrangers. La série précédente, Twisted Roots, proposait déjà une modification de la pratique de l’artiste en s’approchant de la monochromie et en créant des paysages moins définis s’inspirant de l’histoire du paysage en dessin plutôt qu’en peinture. Ici, King va encore plus loin, au sens propre et figuré. | Canadian photographer Holly King’s Mangrove series is an investigation into the artist’s own subconscious. The photographs border on the uncanny, although never uncomfortably so. Instead, her preternatural compositions engage the viewer’s curiosity – the viewer is not sure how to approach, and yet is drawn to do so. At times the images are reflective, occasionally disquieting and always thought provoking. The twisted roots of the mangrove forests that form the base of this series provide an entry point for an investigation into the shadowy parts of the artist’s imagination.
SHERRI HAY
« THE PLACE WHERE YOU LIVE IS LIT BY THE SUN »
* english follows ~ De la tension chromatique entre le noir et le blanc, l’œuvre de l’artiste torontoise Sherri Hay réitère les termes du débat idéologique entre le héros et le vilain, le bien et le mal, en jouant, à la fois au niveau formel et métaphorique de l’œuvre, des possibilités de nuances et d’entre-deux qu’il recèle, soulevant ainsi l’actualité de ce débat non résolu. Suite aux séries de dessins So full is the world of calamity that every source of pleasure (2007) et de globes de neige Wish you were here (2006–2009) dont la résonance appelait toute une tradition visuelle de l’événementiel et du catastrophique, c’est en référant à la structure typée du western cinématographique que cette nouvelle série intitulée The place where you live is lit by the sun (2009) reprend les termes dialectiques du bon et du méchant, de l’amour et de l’indifférence. | We live in a culture that is losing its collective sense of wonder. With daily tragedies and horrors on the 6 o’clock news, it is easy to become numb. Sherri Hay has the rare ability to shock with her art. The theatrical subjects that she depicts in her works are becoming increasingly ethereal and other-worldly. Hay is known for her disaster globes, 5-inch snow globes, transparent spheres filled with both attached and free-floating white polystyrene cut into buildings and highways. When shaken, the tiny people trapped inside fall to their dismal fates, cars spin through the air and silently crash, enacting calamities that we bear witness to and hear about second-hand. We are left to construct their micro-narratives. In this exhibition, entitled The place where you live is lit by the sun, Hay’s work moves further from the familiar.
De façon générale, l’évolution de la production de l’artiste a été interprétée comme une émancipation par rapport aux préceptes du modernisme et comme une négociation avec les différentes tendances de l’abstraction. Or, la fascination nouvelle de ce dernier pour l’intérieur du corps humain semble tisser des liens avec une autre tradition esthétique, plus ancienne celle-là, au sein de laquelle la « chair » constitue le problème central. Elle renvoie bien sûr à la question de l’incarnat posée dès le 15e siècle par Cennini, reprise au 18e siècle par Diderot et actualisée par des théoriciens contemporains comme Didi-Huberman. Or comme le montre ce dernier dans La peinture incarnée, l’incarnat est avant tout l’histoire d’un fantasme : celui de peindre la corporéité vivante, de saisir les forces qui l’animent du dedans afin de traduire, par la couleur, « la temporalité monadique du corps, – celle de ses plus infimes symptômes ou passages.1 » Une énigme que la peinture se donne ici pour tâche d’exprimer, dans un ra port ambigu avec les modes de représentation scientifiques actuels. La tendance vitaliste a toujours été présente chez Blatherwick. Son désir de donner vie au tableau, métaphore de l’organisme, se traduit par une extension dans l’espace (composante installative) et par un rendu inspiré par les dérives de la matière organique, conçue dans son écoulement non-linéaire, avec ses nœuds, ses blocages et ses accumulations. Par des effets visuels de fuites, de suintements et de Coagulations prend forme l’idée d’une défaillance du système, source possible de contamination. Inquiètes, les images rassemblées dans cette exposition donnent à voir des circuits anatomiques étranges où réseaux vasculaires, tissus nerveux et membranes plasmiques communiquent de manière inédite. Dans un désordre coloré, les motifs de globules et de particules cellulaires se dispersent et s’enchevêtrent afin de produire, chez le regardeur, une expérience phénoménale qui résonne avec son propre vécu. En ce sens, la peinture de Blatherwick transforme en fictions ce que nous avons de plus réel et de plus immédiat, la vie, revisitant au présent le projet pictural moderne de « rendre visible l’invisible ».
Within each of the new works, what becomes apparent is that the viewer is presented with a cordoned view of a complex initiative. The multi-layering of paint creates a sense of depth within the tableaux, but the depth appears as a flattened surface, as if the world created by the artist is attainable only through a formal analysis of composition. Yet, the compressed aesthetic of the works is confounded through looping: patterns appear to tangle and disentangle themselves at random, consequentially; the painter succeeds in mirroring the chaos of the molecular. Calculated and controlled, each image appears to stretch over itself, giving way to an order that derives its complexity by insinuating a visual world untouched. The real gives way to the unreal through a masking of painterly affordances that engender a sense that the viewer is privy to a site where milieus of structures act simultaneously. While the works can be argued as non-representational, they are bound by what the artist calls a point of departure. This point of departure can be seen as the ability with which the imagination worms itself within itself, tangling up and knotting, to come to new configurations and adaptations that could have been missed were it not for the opportunity of stasis. Compositionally, these works function under the rubric of abstraction, yet they imply that the way in which the abstract functions allows for the structure -the very cellular make-up of an organism- to come into view so as to generate something new, something unforeseen. In this way, the works generate new intricacies at which to code and re-code the foundations of the unknown.
HOLLY KINGEn effet, King nous invite ici à visiter les mangroves. Loin des environnements simulant des paysages romantiques de ses œuvres précédentes, ces photographies rappellent cet écosystème équatorial qui, à cause du balancement des marées, est peuplé de palétuviers, végétaux « sur échasses », dont les racines ne sont pas entièrement sous terre, ajoutant ainsi une plus-value d’exotisme à l’expérience du paysage par le spectateur. Cette dernière se fait par ailleurs, au travers de prises de vue véritables. L’artiste délaisse donc la fabrication de paysages. Cependant, le panorama en résultant n’est pas une retranscription objective du milieu en question. Photographiés en noir et blanc et colorés ici et là, ces lieux habituellement verdoyants diffèrent des images de magazines à caractère touristiques ou écologiques. Plutôt que sur la végétation, c’est sur la linéarité des formes que l’accent est posé, créant des paysages chargés qui gardent le spectateur prisonnier de l’image, enchevêtré dans les murs de branches et racines qui la composent sans laisser d’ouverture pour s’échapper.
Ainsi, en continuité avec la démarche de l’artiste, la représentation crée un espace psychologique – entanglement signifie à la fois un entremêlement et un état de confusion – que nous pouvons décoder grâce à notre propre bagage de références. Ainsi, à l’instar de l’analyse qu’Edgar Morin fait du cinéma1, le sens des oeuvres de King est créé par une pénétration de l’imagination de l’homme dans le monde réel, participation aussi nécessaire que les propres choix du créateur. Libre à vous maintenant de vous situer dans cette « réalité semi-imaginaire ».
The differences between what we know to be real and what we perceive as real are often slight. The work of Holly King stems from an attempt to prevail over the uncharted territory of both her imagination and that which is perceived as true. In her creations, King endeavours to understand her subconscious mindscape as manifested through photographs recalling actual landscapes. This new series, stemming from earlier pieces also focused on roots, reflects King’s interest in drawing, in the linear subject and in geometric abstraction. It is a move away from previous series – despite the photographic medium in which King works; her oeuvre has contained a certain painterly quality. These new photographs tend to melt into themselves, drawing the viewer in and letting the imagination drift. The Mangrove series causes the viewer to approach with at a slower pace, to investigate deeply into the darker nooks and crannies and to attempt to find reason within a work that so clearly plays with our understanding of real and imaginary.
Nothing is incidental in King’s photographs, yet it is not always manipulated. King’s process often involves the use of maquettes – not digital manipulation of the images – creating an eerily surreal image that seem both familiar and strange. Her photos go beyond setting up the angle and vantage point of the shot; they force us to try to see things as the artist does by their very nature. In her own way, King follows in the footsteps of other notable Canadian landscape artists: the artist forces her viewpoint onto the images, overcoming the landscape’s subject and revealing something more about the artist then perhaps intended. The near perfection of the natural lines and shapes of the mangrove forest provide an entry point for King to contemplate her subconscious thoughts. Equally as important, the series provides an opportunity for the viewer to ponder their own imagined realities.
SHERRI HAY
Le western classique, dont le genre fut porté à son apogée dans les années cinquante, a de particulier la reprise d’un même sujet, contexte et structure, tous participant de son approche manichéiste. Intégrant cette série au projet de réalisation d’un western, l’artiste renoue avec le genre tout en le réinterprétant dans un contexte non plus historique, mais fictionnel et fantastique où sont établis et représentés les deux principaux protagonistes ainsi que le décor dans lequel pourra se dérouler l’histoire encore inachevée. Les œuvres de Hay s’appréhendent dès lors en tant que maquettes scénographiques, ébauches d’un story-board servant à l’élaboration de son projet de réalisation : anomique, la série porte à l’expansion et à la prolifération des possibilités narratives lorsque pensées en relation au déroulement de l’intrigue à venir. Revoyant également la structure temporelle et narrative du western, l’artiste remplace le déroulement linéaire qui lui est propre par celui écourté et fragmenté des œuvres matérielles. Le temps narratif est ainsi délaissé au profit d’un temps matériel, celui de la création et de la confection d’œuvres de papier, telles les vignes et les fleurs faites à la main, omniprésentes dans cette récente série. Espaces oniriques et fantasmagoriques, les œuvres de Hay pointent également leurs références vers le jeu et le jouet en ce qui a trait à la représentation de la boîte et de la figurine, ainsi qu’au mythe et au rite de par, entre autres, les matériaux naturels employés et simulés. Entre jeu et mythe, c’est aussi la portée surréaliste et théâtrale de l’œuvre qui est mise en valeur, rappelant la complémentarité fort prégnante entre les arts visuels et le théâtre dans les années vingt. À la fois artiste et scénographe au théâtre et à la télévision, Sherri Hay présente une série dont les enjeux formels incitent à repenser l’œuvre comme témoin d’une tradition visuelle, théâtrale et cinématographique, corrélation qui se noue ici dans l’attente de l’intrigue.
A 2-foot Plexiglas square box holding water is reminiscent of the disaster globes in its materials and movement, but is slightly more abstract and much more hopeful. Beads of condensation drip down the inside of the container in tiny rivulets, and suggest potential regeneration in the form of a small, safe ecosystem. Nature in these works is exotic and outlandish. Genderless, almosthuman forms covered in flowers offer a reverse anthropomorphism, where bodies bloom with delicate leaves and lilies, each petal giving a small performance. While Hay has constructed other flower people and hand-painted them in bright colours, it is notable that the latest piece, The first star hangs between his feet, is monochromatic. There is great attention to light in this work, calling attention to the contrasts, shapes and surfaces of the disembodied landscape. In it, a leaf-covered creature emerges on the horizon, crawling beneath a canopy of delicate vines on all fours, leaves fanned into hands. Its face is slightly in profile, but there are no features to search for emotion. A lone white bloom punctuates its head like a bold accessory, an adornment against the skin of leaves. The ambiguities in the work create interest as one cannot be sure whether this character is the hunter or the hunted. Hay’s work is an incongruous combination of movie set, outer space and ecological disaster. She takes pleasure in blurring the boundaries between science fiction and social reality, providing a land populated by chimeras and cyborgs that stimulate the imagination.
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